Il pleut, il pleut et il pleut
"Il pleut, il pleut, bergère,
Presse tes blancs moutons,
Allons sous ma chaumière,
Bergère, vite, allons ;
J'entends sur le feuillage,
L'eau qui tombe à grand bruit :
Voici, voici l'orage ;
Voilà l'éclair qui luit"
J'aime
la pluie. Comme j'aime le vent. J'aime bien la regarder tomber.
J'aime même marcher sous la pluie. Et j'aime particulièrement entendre
tomber la pluie. Ce bruit parfois doux et lent, parfois brutal et
intarissable. Le son sur le sol, sur la fenêtre... parfois bruissement,
clapotis ou fanfare. Mais surtout, le bruit de la pluie sur le toit...
J'entends chaque goutte rebondir doucement ou violemment sur le toit.
Le
toit de mon appartement m'offre cette musique mais elle me semble à
peine un murmure... elle ne fait que m'évoquer la pluie qui tintait sur
le toit de chez mes grands-parents. Cette petite maison où on pouvait
toucher le plafond à certains endroits offrait une séparation sûre mais
si mince entre la pluie et le lit. Et lors des nuits d'été,
la fenêtre entrouverte permettait d'entendre aussi la pluie sur le lac.
Une symphonie entre la pluie sur le lac et la pluie sur le toit de la
chambre. Les pluies chez mes grands-parents sont les plus belles
pluies. J'ai d'autres souvenirs de pluies... certains souvenirs drôles,
d'autres tristes, certains terrifiants, parfois désagréables, souvent
doux.
Les
orages, j'aime aussi, mais un peu moins. Je sursaute et j'ai toujours
en tête les histoires d'éclairs dévastateurs... fermons les fenêtres,
ne pas parler au téléphone, fermer la télévision, ne pas ouvrir le
robinet... Mais j'aime bien tout de même le grondement qui suit chaque
éclair. Les orages de Barcelone sont souvent très violents et très
spectaculaires. Les nuages noirs, la pluie torrentielle, les éclairs
aveuglants et le tonnerre étourdissant. On ne voit parfois plus
le château à ma fenêtre et même les tours de la Sagrada Familia sont
parfois effacées du panorama... derrière un écran de pluie ou de
brouillard. Et la mer se surexcite lors de ces orages, les vagues
s'élevant hautes et alarmantes.
Depuis une semaine, il pleut.
Il pleut, il pleut et il pleut. Je pleus, tu pleus, nous
pleuvons... J'aime la pluie, j'aime marcher sous la pluie, et
j'aime écouter la pluie, surtout la nuit. Mais, il pleut trop...
sans arrêt... et mes plantes si violentés par le vent, sont
maintenant inondés par la pluie. Les rivières débordent, les caves se
remplissent.
Toute cette eau est sauvage, belle, triste et nostalgique. Elle lave la rue et noie mes fleurs. Elle
s'infiltre parfois dans le bois usé de mes fenêtres antiques mais
vieilles. Mon chat regarde mélancoliquement par la fenêtre, gratte pour
sortir et retourne silencieux se coucher.
Et lorsque je
vais à mon tour me coucher, je soupire en espérant que demain il fasse
un peu soleil, tout en me laissant bercer par les gouttes sur le toit
et sur la fenêtre.