Les archives de Pauline: La danse du vendredi soir
Dans un petit village québécois, il y a peu de possibilités pour se
distraire. Et pour une jeune fille vivant dans ce petit village pris dans des
années 50 qui ne semblaient pas vouloir se terminer, il y avait peu de
distractions qui en valaient la peine. Elle avait grandi dans ce village. Elle
y avait joué, été à l’école, puis travaillé. Elle y avait des amies. Et y
vivait avec ses parents, ses frères et ses soeurs. Ensuite, elle déménagera avec
toute sa famille dans la « grande ville ». Il y aura alors beaucoup
plus de distractions.
Car la jeune fille aimait sortir et surtout danser. À chaque fois qu’elle
le pouvait, elle se maquillait, se coiffait, s’habillait et allait danser. Elle
adorait danser. Depuis des années déjà qu’elle dansait. Elle et son grand frère
avaient même gagné des concours de danse. Ils se pratiquaient beaucoup. Danser à
cette époque voulait habituellement dire danser en couple. Des chansons lentes,
des chansons rapides… l’homme et la femme dansant ensemble.
Et elle aimait danser. Alors que ce soit dans son petit village ou dans la
grande ville, elle trouvait toujours moyen d’aller danser. Les vendredis soirs étaient
habituellement soirées de sorties. Elle se pomponnait et partaient avec ses
amies pour une soirée de danse et de flirts innocents… enfin, selon ses dires.
Elle se maquillait, se faisait des coiffures agrémentées de postiches et mettait ses plus belles robes. Petites robes à bretelles… évidemment sa mère l’obligeait à couvrir ses épaules d’un petit manteau. Qui disparaissait habituellement aussitôt le coin tourné.
Elle sortait à chaque semaine. C'était une tradition à laquelle elle tenait. La danse du vendredi soir était presque obligatoire. C'était l'occasion d'oublier la semaine, de se mettre belle, de rire avec ses amies, de rencontrer de jeunes hommes et de danser, danser, danser.
Pas question de manquer une danse du vendredi soir. Et donc, elle se devait de sortir tous les vendredis. Mais il y avait des vendredis différents. Le vendredi saint, par exemple. Elle ne voyait pas de différence, mais sa mère n'approuvait pas du tout. Le vendredi saint, c'est sacré. C'est la passion, c'est la mort de Jésus... c'est un moment de silence, de prière et de recueillement... pas un moment pour s'amuser et danser.
Mais la jeune fille ne voulait pas manquer un seul vendredi. Et donc, elle di à sa mère qu'elle était une adulte, qu'elle travaillait et qu'elle était assez vieille pour savoir ce qu'elle faisait. Elle sortait ce soir. Ces amies l'attendaient. Sa mère de lui dire alors, que si elle sortait en ce vendredi soir, elle rencontrerait le diable. Le diable profitait de la faiblesse des jeunes filles qui aimaient danser pour les séduire et les enlever. Si elle sortait ce soir, un grand homme sombre, séduisant et mystérieux lui demanderait pour danser. Et ce bel inconnu serait le diable en personne.
Rire de la jeune fille. Superstitions de bonnes femmes. Elle sortirait
ce soir. C'était un vendredi comme tous les autres. Rien ne l'empêcherait
d'avoir du plaisir et de danser. Elle se prépara et partit rejoindre ses amies.
La soirée était fantastique. De la bonne musique, et du potinage entre copines.
Et puis soudainement, la musique changea. Une musique lente et sensuelle...
elle se tourna vers la piste de danse. Et elle l'aperçut. Un grand jeune homme
aux cheveux noirs se dirigeait vers elle. Il était grand, séduisant,
extrêmement beau... et mystérieux.
Elle se redressa, sourit et attendit qu'il s'approche. Elle savait qu'il venait lui demander pour danser. Elle était jeune, belle et dansait si bien. Et voilà que ce bel inconnu qu'elle n'avait jamais vu auparavant s'approchait d'elle. Toutes les filles de la salle le regardait et enviait la jeune fille. Il était si beau. Mais alors qu'il était tout près d'elle, les paroles de sa mère surgirent soudainement à son esprit. Elle tenta de les chasser... c'était des superstitions, des racontars, des histoires pour faire peur aux jeunes afin de les empêcher de s'amuser. Mais alors qu'il lui demandait sensuellement si elle voulait danser avec lui, elle ne trouva pas la force de faire taire la voix de sa mère... et s'entendit refuser l'invitation. Ses amies furent complètement renversées... Elle-même était incapable de comprendre sa réponse. Elle regarda le séduisant jeune inconnu aux cheveux noirs rebrousser chemin. Il se dirigea vers une autre jeune fille qui dansa avec lui toute la soirée...
Elle ne le revit plus jamais. On disait qu'il était un cousin en visite... on ne savait pas bien de qui il était le cousin, mais il venait d'une autre ville. Il était beau, mystérieux et savait danser... le diable en personne !