La Chasse-galerie: II. Commentaires
La Chasse-galerie,
légendes canadiennes / Honoré Beaugrand, Montréal, 1900, 123 p.; Fides, 1979, 107 p.
Commentaires :
Ce conte fait partie du
patrimoine québécois autant d’un point de vue littéraire que traditionnel. Au
Québec, c’est la version d’Honoré Beaugrand qui est le plus connu. L’auteur s’est inspiré de légendes et
folklores du Québec, mais également de la vie quotidienne. Il raconte
l’histoire du Québec, sa vie quotidienne, ses coutumes et traditions.
La
« Chasse-Galerie » s’inscrit parfaitement dans le contexte de
l’époque : la vie des coureurs des bois, les traditions et coutumes de ces
hommes des bois, les traditions de Noël et du Jour de l’An, les croyances et
peurs dans le fantastique, le diable, la présence incontournable de la religion
dans la vie des gens, et même la consommation d’alcool… On note aussi dans son
récit, la fascination pour un monde qui demeurait mystérieux pour la majorité des
gens : le monde de la route, des coureurs des bois, des hommes qui
s’enfonçaient pour des mois dans les profondeurs de la forêt. Forêts et routes,
mondes remplis de mystères, de créatures étranges, de noirceurs…
On retrouve également dans ce
conte la recherche du fantastique et le goût de s’effrayer…On peut facilement
voir les craintes et les peurs des gens de cette époque : le diable,
l’enfer, la perte de son âme… Et on voit également la présence de l’église et
de la religion qui jouait volontiers avec ces peurs pour garder les gens dans
le droit chemin. Le conte était également une occasion de provoquer une rupture
avec le quotidien et permettait d’entrer dans un autre ordre du temps, de
l’espace, … un autre univers extraordinaire. On le dit toujours rituellement au
début du conte : on va maintenant conter une histoire qui va changer la
vie des auditeurs.
Ce conte fait partie des
traditions orales du Québec. Il était conté lors des veillées en famille ou
dans les réunions de paroisses. Il a forgé l’imaginaire québécois et nous offre
non seulement une histoire fabuleuse mais également un regard sur la société de
cette époque.
Mais si ce conte fait partie
de la culture québécoise, on sait que les premiers colons ont mélangé des
éléments de légendes françaises avec des mythes amérindiens qui parlent de
canoës volants. Cette légende est connue
dans plusieurs cultures à travers le monde, sous différents noms.
Il y a tout d’abord, la
légende française qui parle d’un noble très riche qui aimait la chasse et qui
selon certaines traditions auraient eu le nom de Gallery. Un jour au lieu
d’aller à la messe, il décide d’aller chasser. Il fut alors condamné à errer
dans le ciel tout en étant lui-même chassé par des cheveux et des loups.
Dans la Banque de dépannage linguistique panfrancophone, un article très intéressant fait venir le mot
« chasse-galerie » du parlers de l’Anjou, du Poitou et de la
Saintonge. Le mot ne serait attesté en France que depuis 1829 (ou peut-être
depuis 1791), et il serait arrivé au Canada au XVIIe siècle au Québec et en
Acadie. On y traite également de l’étymologie du mot « chasse-galerie ».
Le mot chasse devrait être pris dans son sens collectif qui englobe les
chasseurs, les chiens de chasse, l’équipement, etc. Le mot
« galerie » pourrait venir du nom du noble qui avait été condamné à
errer dans le ciel. Ou encore le mot serait rattacher aux mots
« galier » et « gaille » qui en ancien français ou en
patois signifieraient « cheval ».
On dit aussi que l’histoire
viendrait aussi de la « troupe infernale ». La troupe composée de
diables, démons, sorciers, etc. courraient dans les airs pendant la nuit, et
faisait un grand vacarme : hurlement, aboiement, sifflements, etc. La
légende de la chasse-galerie sert alors à expliquer les bruits étranges de la
nuit…
On rattache également la
légende à ce que les anglo-saxons appellent la « Wild Hunt ». Cette
chasse comprenait un groupe de chasseurs –souvent des spectres- qui se
lançaient dans une course folle dans les cieux. Voir cette Chasse sauvage
n’était pas un bon présage et annonçait des catastrophes. Si on se trouvait
dans le chemin des chasseurs, on pouvait être enlevés et amené aux Enfers.
Cette légende se trouve en Angleterre, Allemagne et même dans les pays
Scandinaves. On pourrait en dire beaucoup plus sur les origines de la.Wild
Hunt.
On peut même faire remonter
les origines de la légende de la Chasse-Galerie aux Vikings. On parle alors de
ressemblances avec des récits mythiques liés au dieu Wotan. Ce dieu de la
guerre chevauchait un cheval ailé à 8 pattes, il transmettait la rage à ses
combattants, et ses apparitions avaient apparemment lieu entre Noël et
l’Épiphanie. Les apparitions du dieu sont accompagnées de cris. Les récits
concernant le dieu se sont transformés a leur introduction en France et avec la
christianisation. On peut la rattacher aussi à la croyance française que
lorsqu’on s’enrageait, on était condamné à notre mort à errer dans le ciel pour
toujours.
Peu importe les origines de la légende, elle fait aujourd’hui partie des traditions québécoises…
Premier article: La Chasse-galerie: I. L'auteur et le récit
Sources :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Chasse-galerie
http://www.ratsdebiblio.net/beaugrandhonore.html
http://www.forum.umontreal.ca/numeros/1999-2000/Forum00-02-21/article06.html
http://en.wikipedia.org/wiki/Wild_Hunt
© 2006 Laila Seshat